Chilling Out in Montreal on a Cold Winter Night in the Month of February: A Sensory Ethnography of Nuit Blanche

by Aurélie Roy Bourbeau

Itinerary 2

La nuit du 25 février fut bien généreuse. Je m’étais préparée au froid et étais très attentive aux sensations qui m’ont parcourues lors de la nuit. Je me suis promenée au travers de plusieurs évènements et de leurs ambiances à chaque fois, je contrais le froid avec plaisir. Le trajet était réalisé à pied ou en transport en commun. Ces moments de transport me procuraient un certain repos entre les évènements. Étant originaire de Longueuil, je suis familière avec la Nuit Blanche, mais ne participe pas annuellement. Je conceptualisais l’évènement comme étant touristique, ayant beaucoup de files d’attente et beaucoup trop de monde.

Le 25 février, il y avait une forme de frénésie dans l’air, une sorte d’excitation perceptible dans les mouvements de plusieurs qui anticipaient passer une belle soirée. Les festivités sont majoritairement à l’intérieur et ce n’est pas la majorité des habitants qui y participent. De plus, c’est un festival relativement calme, dû à la grande présence des musées. La Nuit Blanche c’est l’amalgame de plusieurs lieux qui offrent gratuitement leur espace pour cette journée spéciale et créer des expériences particulières. La nuit commençait officiellement à 20h, je suis alors sortie avec des collègues de l’université Concordia vers le Musée des Beaux-Arts. Ensuite, je me suis déplacée à pied vers le Centre Canadien de Montréal, puis je suis allée seule à pied et en métro au Centre Phi rejoindre une autre collègue, je me suis ensuite déplacée en métro vers la station Préfontaines pour aller à LESPACEMAKER et ainsi entrer dans un autre univers. J’ai terminé la soirée avec un bon chocolat chaud à la place des arts.

La première sortie était froide, le soleil était tombé depuis un moment déjà. La nuit à Montréal est assez éclairée, mais il est souvent possible de percevoir des étoiles, ce que je trouve toujours un peu surprenant. Le poids de mes couches de linges et de mes bottes, le froid glacial du vent de février et la neige du sol affecte le pas et le rend moins léger.

Au Musée des Beaux-Arts, nous n’avons pas eu à attendre à l’extérieur, mais il y avait une longue file que nous avons évitée pour le vestiaire. Néanmoins, nous avons dû transporter nos vêtements dans le musée, ce qui est inconfortable et qui enlève de la fluidité aux mouvements. Le musée était rempli de personnes curieuses qui ne savaient pas trop à quoi s’attendre. Les agoras sont parfois anxiogènes, particulièrement si les personnes ne sont pas coordonnées ou conscientes de leurs prochaines étapes. Il y avait des activités de peinture qui étaient proposées, c’est une immersion dans le monde de l’art et un moment de détente où l’on peut s’asseoir et se laisser aller. Malgré la quantité de personnes, le musée était visuellement splendide et l’euphorie agréable. La musique était parsemée de bribes de chants de gorge pour correspondre avec le thème de Musique du Nord. De leurs côtés, les dégustations me semblaient désaxées étant conçues de brochettes de mûres et de choux de Bruxelles, ainsi que du vin en accompagnement, ce qui ne rappelle pas la culture inuite. Vivre le musée la nuit et de manière plus chaotique qu’à l’habitude inspire moins de sérénité, mais rend l’art plus vivant.

Le second musée était le Centre Canadien de Montréal, il y avait un vestiaire qui nous permettait d’être plus libres et un évènement où plusieurs personnes étaient installées confortablement sur des coussins à discuter. Il y avait aussi une exposition sur les peuples du nord, mais celle-ci était beaucoup plus immersive. Il était possible de toucher et de sentir les accessoires. On pouvait sentir entre autres le cuir des peaux. L’espace était conçu pour sentir que l’on était à l’intérieur d’une maison, c’était très chaleureux. Il y avait aussi des projections de deux femmes qui discutaient que l’on voyait de pleines grandeurs, cela donnait une impression de familiarité et de proximité avec les clones virtuels.

Puis, je suis repartie vers le centre Phi, j’ai un peu attendu à l’extérieur, mais c’était agréable de voir la boucane sortir des véhicules dû au froid. L’intérieur était agréable, une lumière tamisée et une ambiance de bar avec une salle de danse. Il y avait une odeur particulière que je décrirais comme celle d’un mélange d’alcool et de sucre ainsi que de la danse moderne où chacun bouge individuellement sans toucher le corps des autres. De plus, nous avons dansé avec nos manteaux sur le dos ce qui curieusement, n’était pas trop chaud ou lourd. Il y avait une pièce où les personnes étaient assises et semblaient profiter de la musique et de la compagnie de leurs ami.es qui était illuminée par plusieurs lampes qui scintillaient. Un scintillement lent et doux qui apportait une ambiance de fêtes décontractée et huppée. Quelques œuvres étaient accrochées dont une particulière qui rappelait les sculptures grecques et qui était dotée de cristaux. L’œuvre d’art nous attirait et quelques-uns ont tenté de la toucher.

Ensuite, nous sommes reparties en trio vers une destination plus lointaine et d’un genre anarchiste dans le Centre-Sud de Montréal, à LESPACEMAKER. Il y avait un feu, contrôlé et enfermé qui nous accueillait et réchauffait à l’entrée d’un hangar. Deux DJ étaient présents, un à l’étage où nous nous promenions au travers d’un labyrinthe décoré de différentes œuvres telles que des peintures, des assemblages de cordes et des projections. Il y avait beaucoup d’art interactif et une liberté de pouvoir toucher. Il n’y avait pas d’odeur spéciale, mais une petite dégustation de meringues. Les personnes étaient décontractées. Au rez-de-chaussée, il y avait une piste de danse avec un autre DJ, la température froide s’évadait lorsque nous dansions et il y émanait une odeur de biscuit. L’odeur était agréable, mais semblait être hors contexte et à la fois donnait un sentiment de familiarité à l’espace. L’espace était décoré de dessins sur le mur et parfois une machine à boucane obstruait notre vue et nous donnait une plus grande liberté et conscience de notre propre corps.

Nous sommes alors reparties, de retour dans le froid et le ‘’silence’’ de la ville qui est rarement réellement silencieux. Sur le chemin vers le métro, nous avons aperçu la brillance qui émanait de la neige lorsqu’elle est illuminée par les lampadaires des soirs d’hiver et entendre nos pas dans la neige croquante. De retour dans le métro sali de ce que l’on appelle la slush, la ligne verte produit un son intense et fort, la fatigue mentale et physique se faisait sentir. Or, nous avons décidé de l’ignorer et de finaliser notre aventure avec un bon chocolat chaud, pas brûlant et juste assez sucré, à la Place des Arts.

Les installations de la Place des Arts étaient visiblement plus organisées et corporatives. Il y avait de la publicité et de grosses infrastructures. Tout se passait à l’extérieur et malgré le froid qui se faisait plus fort au courant de la nuit, il y avait une foule immense rassemblée et collée qui dansait aux sons d’un dernier DJ. La proximité des autres personnes protégeait du froid et menait à suivre le mouvement commun de la danse.  En observant le comportement des personnes, il était évident que plusieurs étaient et état d’inhibition. Un groupe d’amis prêts de nous a échappé un sac en tissu parterre. Le sac contenait un contenant en verre rempli de ce que je crois être du vin rouge. Le bruit de l’accident était un impeccable « POC! », un son lourd et sec à la fois, et nous avons pu voir le liquide rouge s’étendre sur le sol enneigé. Plus loin, des œuvres interactives suivaient nos mouvements avec de la lumière et d’autres infrastructures produisaient un son de clochette qui étrangement résonnait bien avec la musique électronique.

La soirée était ainsi terminée, vers les 2h du matin. Il y avait plusieurs personnes qui criaient dans le métro et qui semblaient continuer la fête. À chaque évènement, l’ambiance était différente, mais aussi les genres vestimentaires et les comportements des spectateurs étaient différents et adaptés au lieu. Aussi c’était intéressant de sortir à l’extérieur entre les évènements et d’avoir un moment plus calme et radicalement plus froid. Cela coupait la soirée et la continuité des évènements. Somme toute, la soirée était intéressante, particulièrement parce que j’avais une mission et que j’étais à l’affût de toutes mes sensations.